Les rois et les généraux s’agitent sur la scène politique ; prêtres et charlatans donnent aux hommes le genre de vérité qu’ils aiment entendre ; guerres et famines ont mis les peuples à genoux : qui donc se sent responsable de la mission d’Israël, instrument de Dieu dans le monde ?
C’est alors que Dieu cherche celui à qui il donnera autorité, non seulement sur Israël, mais sur toutes les nations, avec mission de déraciner et détruire, de bâtir et de planter. Autrement dit, Dieu lui confie la mission de faire avancer l’histoire. Cet homme sera Jérémie, un jeune d’Anatot, fils d’une famille de prêtres.
Jérémie a donc prononcé les discours qui se trouvent dans ce livre, mais il est aussi celui qui a vécu les événements comme témoin de Dieu. Il a coopéré avec Dieu - le mot ne doit pas nous faire peur - dans ses décisions suprêmes qui dirigent l’histoire.
Car c’est bien Dieu qui rassemble les forces et guide les événements de sorte que l’un va à l’échec, tandis qu’un autre réussit. Dieu est à l’œuvre dans l’histoire par l’intermédiaire de l’activité, des écrits et des prières d’innombrables personnes. Mais il suscite aussi des forces plus profondes qui secouent l’inertie des cœurs et augmentent le désir de justice dans le monde. Et dans ces domaines que Dieu se réserve, seuls coopèrent avec lui ceux qui se sont entièrement consacrés à lui.
Les amis de Dieu prennent part à sa gestion souveraine des événements : Abraham (Gn 18,16), Moïse (Ex 32,14), les martyrs (Ap 20,4). Jérémie, le garçon réservé et pacifique d’Anatot, est devenu aussi un ami de Dieu : il a été totalement saisi par Dieu, et Dieu lui a communiqué son amour jaloux pour Israël et sa colère à cause du péché. C’est ainsi qu’il a pu prononcer avec Dieu les condamnations d’Israël et annoncer le grand changement de l’Histoire Sacrée : la Nouvelle Alliance.
Non sans raison, dans les temps qui suivirent, les Juifs pensèrent qu’après sa mort Jérémie se tenait devant Dieu, intercédant pour eux (2M 2,1 et 14,14). Quand, par la suite, les prophètes parleront des souffrances du sauveur, ils auront à l’esprit les épreuves de Jérémie.
Entre les dernières prophéties d’Isaïe (690 av.J.C.) et la vocation de Jérémie (environ 626), il y a un intervalle de soixante années, dont presque cinquante coïncident avec le règne de Manassé, le roi persécuteur (2 R 21). Ensuite, en 640, un enfant, Josias arrive sur le trône et, peu à peu, les braises de la foi se rallument.
C’est à ce moment-là que la découverte du livre de la Loi donne le signal d’un renouveau religieux, la réforme de Josias (2 R 22). Mais, Dieu avait déjà appelé Jérémie quelques années plus tôt.
A partir de ce moment là, les événements dont Jérémie sera le témoin tournent au tragique. Nous en trouvons le récit dans 2 R 23, 25 et aussi dans Jr 39.
Il est difficile de dire qui a rédigé le livre de Jérémie, et comment. Il semble bien que Baruch, “le secrétaire”, c’est-à-dire, le chancelier du roi, y a pris une part importante, et que Jérémie lui-même lui a dicté bien des choses. Divers indices font penser qu’on a fusionné deux écrits qui se recouvraient en partie.
Les paroles de Jérémie ne sont pas reproduites dans l’ordre chronologique. Le livre comprend quatre parties :
— Prophéties contre Juda et Jérusalem : chapitres 1-25.
— Prophéties contre les nations. Annoncées à la fin du chapitre 25, elles forment les chapitres 46-51.
— Promesses de bonheur : chapitres 29-35.
— Les souffrances de Jérémie : chapitres 36-45.