Qui est ce Jacques ? Sans doute le “frère du Seigneur” (voir la note en Mc 3,31. Il est favorisé d’une apparition particulière de Jésus ressuscité (1Co 15,7), et c’est à lui semble-t-il que Pierre, au moment d’entrer dans la clandestinité, confie l’Église de Jérusalem (Ac 12,17 ; 15,13 ; 21,18). Dans la suite il sera considéré comme le responsable de toutes les communautés chrétiennes à majorité juive établies en Palestine, Syrie et Cilicie (voir Ac 15,13-29).
Bien que la lettre porte son nom, il a fallu attendre le quatrième siècle pour qu’elle soit reconnue par l’ensemble des Églises, mais cela ne préjuge pas de la date à laquelle elle a été écrite. Aujourd’hui certains font remarquer que la qualité du style suppose l’intervention d’un rédacteur plus lettré que ce Jacques de Nazareth. Il est bien évident que Jacques, tout comme Pierre et même Paul, a fait appel à un secrétaire qui peut avoir été beaucoup plus qu’un scribe à qui l’on dicte le texte.
Cette lettre est l’écrit du Nouveau Testament qui dénote le plus de parenté avec l’Évangile de Matthieu, même s’il s’agit de thèmes qui sont communs à tous les écrits apostoliques ; on y retrouvera en particulier les échos du Sermon sur la Montagne. Elle nous donne comme un autre versant de la vie des communautés juives de Palestine et de Syrie, complétant l’image négative qu’on pourrait en retenir si l’on s’en tenait à la difficulté que beaucoup de leurs membres éprouvaient pour se libérer de la loi de Moïse. La lettre de Jacques rappelle, comme l’Évangile de Matthieu, que la Loi éduque pour la liberté (2,12). Elle est à sa façon une voie royale (2,8) pour ceux qui cherchent la perfection.
Un des points de cette lettre qui ont le plus attiré l’attention est l’insistance très forte de Jacques sur l’inutilité d’une foi qui ne se traduit pas par des actes (2,14-26). Cette insistance contraste avec les affirmations de Paul qui, tout spécialement en Gál 5 et Rom 4, affirme que nous sommes sauvés par la foi et non par les œuvres. Il est impossible de nier la volonté de se corriger l’un l’autre, car une étude comparée des épîtres oblige à dire que Jacques connaissait la première lettre de Paul aux Corinthiens quand il a écrit celle-ci. Et Paul, à son tour, connaissait la lettre de Jacques lorsqu’il a écrit la lettre aux Galates et la deuxième aux Corinthiens.
Les textes des Actes relatifs au concile de Jérusalem invitent à ne pas forcer l’opposition entre ces deux apôtres (voir les notes de Ac 15) ; Paul, qui critique durement l’entourage de Jacques, semble avoir eu pour lui personnellement plus que du respect. Ici, s’adressant à ses fidèles de Jérusalem, Jacques leur enseigne des choses simples et pratiques inspirées de la sagesse de l’Ancien Testament. La religion authentique se reconnaît à la façon dont nous vivons et traitons ceux qui nous entourent.
La lettre de Jacques, compte tenu de ce que nous avons dit, doit avoir été écrite en 56 ou 57. De toute façon, on sait que Jacques mourut lapidé en 62.