1 Où s’en est-il allé, ton aimé, —ô la plus belle des femmes—
où s’est-il dirigé, ton aimé,
pour que nous le cherchions avec toi ?
ELLE :
2 Mon aimé est descendu à son jardin,
à ses parterres de plantes odorantes ;
il fait paître le troupeau dans son jardin,
il y cueille des lis.
3 Je suis à mon aimé, et mon aimé à moi,
lui qui mène le troupeau parmi les lis.
LUI :
4 Tu es belle, ô mon amour, comme Tirsa,
gracieuse comme Jérusalem.
5 Détourne de moi tes yeux,
ils m’ont ensorcelé.
Tes boucles sont un troupeau de chèvres
qui s’accrochent aux pentes de Galaad ;
6 tes dents sont des brebis tondues
qui remontent toutes blanches du lavoir ;
chacune a sa jumelle,
pas une ne l’a perdue.
7 Tes joues, sous ton voile,
sont les moitiés d’un fruit vermeil.
8 Les reines sont soixante,
les favorites quatre-vingts,
les filles, innombrables :
9 unique est ma colombe, ma parfaite !
Elle est unique pour sa mère,
la préférée de celle qui l’a enfantée.
Les filles, en la voyant, l’ont dite bienheureuse,
reines et favorites proclament ses louanges :
10 “Qui est celle-ci dont l’aurore se lève,
belle comme la lune,
flamboyante comme soleil en son midi,
redoutable comme une armée bien ordonnée ?”
11 Au jardin des noyers je suis descendu,
pour voir si cela pousse dans la vallée,
pour voir si la vigne bourgeonne,
si les grenadiers sont en fleur.
12 Et je ne sais, d’un coup, cela m’est venu :
j’ai pris la tête des chars de mon peuple !
Le Chœur :
L’amour est fort comme la mort, il garde jalousement... Le poème se termine par la promesse de l’union éternelle du Seigneur avec son peuple. L’amour du Dieu jaloux est fort, et fort aussi est l’amour qu’il met dans le cœur de ses enfants : qui nous séparera de l’amour du Christ ? (Rm 8,35).
L’amour, tel qu’il s’exprime ici - amour divin ou amour humain, c’est le même s’il est vrai - est bien éloigné de ce qu’en connaît notre société. Si elle a vu l’amour de l’homme et de la femme se libérer des contraintes de la vie sociale, dominer peu à peu les préjugés séculaires de la domination de l’homme sur la femme, devenir le lieu privilégié de la communication des personnes, en même temps, elle a vu croître la peur de “perdre sa propre vie” en se liant totalement à une autre personne. Un très grand nombre essayent d’allier ce qui est contradictoire : un amour qui mènerait à la plénitude de la joie et à la plénitude de soi, et une décision secrète de rompre dès qu’on pensera trouver mieux.
Ici le texte biblique donne la priorité, non au bonheur mais à l’amour. Le Cantique, c’est une volonté de connaître l’amour quel qu’en soit le prix, et l’Evangile nous en dit le prix. Le mariage ne sera réhabilité qu’à partir d’une telle base : on se marie pour répondre ensemble à un appel, et le bonheur ici-bas sera quelque chose de gratuit, et de la façon que Dieu voudra le donner.
Les derniers versets du Cantique des Cantiques, à partir de 8,8 sont probablement des versets ajoutés plus tard qui contiennent des références politiques. Le fait qu’on les ait insérés ici est assez significatif : il semble confirmer qu’on lisait dans le Cantique les aspirations de la communauté d’Israël et sa volonté de ne pas se détourner de son attente.